mardi, avril 13, 2004

Chapitre 13 : Sales betes !

Mais évidemment, ces sécrétions d'un autre âge, bien que lancées avec doigté, n'étaient pas de taille face à nos idoles : Horion et Colinéus effectuèrent un preste et majestueux pas de danse pour éviter cette attaque tout en poussant un petit cri sarcastique bien connu : « olé ». Fiers comme des paons, ils se retournèrent vers Maëlle et lui adressèrent chacun un clin d’œil coquin afin de s'assurer qu'elle les avait bien observés. Selon eux, ces jets étaient juste un bon prétexte pour se mettre en valeur et en évidence devant leur amour. C'était leur moyen de drague, qui avaient fait déjà leurs preuves à moult reprises, essentiellement devant leur poste de télévision.
Ils étaient encore plongés dans leurs pensées, à se demander quel effet cela avait pu produire chez Maëlle, mais aussi s'ils n'y étaient pas aller un peu trop fort pour son esprit non initié à tant de talents, quand Artefact les prévint :

- Arrêtez de vous la jouer les gars, j'ai l'impression qu'il s'agissait d'attaques boomerangs ou à têtes chercheuses, les voilà qui reviennent vers vous de plus belle.

Et c'était tout à fait vrai. Déjà les deux missiles fonçaient de nouveau vers les deux chevaliers, ils eurent juste le temps de les esquiver une seconde fois mais d'extrême justesse. Cette fois-ci, point de sourires ni de clins d’œil et ni de "olé". Ils s'interrogeaient plutôt comment se débarrasser de ces insanités tout en sachant qu'une seule goutte suffisait pour les contaminer. L'utilisation de leur armure comme moyen de défense devenait par conséquent trop dangereux. Ils devaient donc à la fois les éviter sans arrêt et également compter en la personne du désormais impotent Artefact pour les sauver.
Ce dernier tentait de réfléchir en dépit des démangeaisons insupportables que provoquait sa lésion scabieuse qui, il s'en doutait, avait atteint le bas de sa jambe. Si bien qu'il avait de plus en plus de mal à supporter sa cnémide. Il se voyait d'ores et déjà dans un état de vieillards décrépis, traînant sa misérable dépouille agrémentée d'indicibles relents de putréfaction, juste avant d'être éviscéré à coups de bêches par ces satanées larves.
Il fut tiré de ses réflexions par Maëlle qui le supplia de venir la délivrer :

- JT... Artefact ! A moi, par pitié !... Oh toi mon héros...
- Mais... et mes amis ?...
- Moi d'abord, aboya-t-elle, soudain furieuse. Je te
l'ordonne ! Sois mon esclave !

Chers lecteurs, veuillez ne pas vous offusquer de ce comportement ingrat, mais Maëlle était si lasse de ses souffrances qu'elle éprouvait manifestement un certain mal à raisonner sainement, surtout qu'Icarios commençait à défaire ses liens pour l'emmener Dieu sait où. Sûrement vers un autre cloaque. Alors je vous en prie, ne lui jeter pas la pierre.
Artefact était face à un choix cornélien et s'autorisa un moment de réflexion pendant que ses compères effectuaient continûment une valse improvisée et grotesque et que Maëlle était sur le point de leur échapper.

Il prit enfin une décision. Il dit à sa tendre et belle :

- Très chère Maëlle, je te prie point d'esclandres, Tout d'abord mes amis, je me dois de défendre ! Cela m'arrache le cœur de te savoir en si mauvaises mains et de devoir à nouveau me passer de ton petit nez de castor et de tes mains d'orang-outan, mais sans mes potes, je ne pourrais lutter efficacement. Pourtant que le temps me semble long quand de toi je ne puis avoir que des souvenirs ou de simples créations oniriques...

Maëlle, émue, buvait ces paroles comme un étudiant buvait de la sangria.
Incroyablement, ces vers, si émouvants et si bien composés en direct live, avaient déclenché on ne sait ni où ni comment une espèce de magnétophone d'où sortait une mélodie doucereuse et envoûtante : des violons d'exception, des orgues vaporeux, et des flûtes enchantées jouaient à la perfection l'air d'un slow romantique à souhait que tout le monde connaissait : « Branle, branle, branle Charlotte ».
Même Icarios en fut bouleversé et ne put s'empêcher de pleurer comme un bébé devant cette séparation douloureuse dont il était pourtant l'unique responsable. D'ailleurs il dut se moucher bruyamment sous ses aisselles pour évacuer cette tristesse enivrante et inconnue. A un moment, on crut même qu'il allait faire preuve de commisération et abandonner là sa victime. Cependant, ce doute ne subsista qu'une fraction de seconde et il continua de plus belle à délier frénétiquement les attaches.

- Ho hé ! rugit un Colinéus fatigué à l'attention d'Artefact, c'est pour aujourd'hui ou pour demain ?

Tout à coup sorti de sa léthargie, l'Erudit saisit deux Psychos au regard hagard et imbécile puis shoota dedans comme s'il s'était agi de vulgaires ballons de football en peluche. Il visa les deux jets de sperme, et grâce aux effets liftés qu'il avait imprimé à ses projectiles de fortune, il les atteignit du premier coup. La semence d'Icarios entra dans ces monstres inférieurs... mais ces êtres étaient d'une telle médiocrité cérébrale que les larves ne mirent que cinq centièmes de seconde pour les vider de leur substance nutritive et s'en extraire. Seulement voilà, elles étaient du coup trop frêles pour survivre et moururent aussitôt. L'énergie que leur avait donné les Psychos étant bien trop insuffisante même si cela suffisait amplement pour ces créatures dont on ignorait l'utilité et le but de leur existence à part payer pour assister à des spectacles sordides.
Le Mélomane et le Gardien de la Force furent soulagés de s'être tirés sans séquelle de ce mauvais pas et remercièrent leur camarade :

- Ouaip trop fort mec, félicita Horion
- Pour Artefact, hip hip hip hourra, chanta Colinéus
- Et moi ? implora Maëlle qu'Icarios était enfin parvenu à défaire de ses liens
- Oh la la, deux secondes on arrive, dit Colinéus.

Normalement, nos amis auraient du parvenir à sa hauteur avant qu'elle ne soit entraînée par le démon, mais c'était sans compter la brusque insurrection des Psychos. Ces derniers avaient assisté à toute la scène depuis l'arrivée des Métal Warriors et, eu égard à ce qu'il était advenu à deux de leurs congénères additionné au temps qu'il avait fallu à leur simulacre de cerveau pour saisir le danger que représentaient les trois héros, ils paniquèrent et sanglotèrent. Dans une réaction de sauvegarde de leur espèce saugrenue, ils se levèrent de leur strapontin et prirent dans un tohu-bohu des plus bordelliques la direction de la sortie de l'amphi. Ils courraient comme des damnés poursuivis par une meute de limaces. Certains versèrent tellement de larmes de leur corps rabougri qu'ils se déshydratèrent. D'autres tombèrent et furent écrasés puis mis en charpie par les pattes sales de leurs semblables.
Cette foule dévergondée fit obstacle aux chevaliers qui se dirigeaient vers l'estrade, mais gêna également Icarios qui, sous les coups de boutoirs de ces bons à rien, dut un bref instant relâcher la prise qu'il exerçait sur Maëlle. Cela suffit à celle-ci pour se libérer et s'insérer dans le flot des Psychos. Elle ne cherchait qu'une chose : s'éloigner le plus loin et le plus vite possible de cet amphi, à jamais gravé dans sa mémoire, même si pour cela elle ne se rendait pas compte qu'elle s'éloignait des seules personnes pouvant la sauver : les trois saints de l'histoire que constituent les magnifiques Métal Warriors !