Chapitre 28 : Bienvenue en Enfer
Les 2 cavaliers hâbleurs et atrabilaires étaient partis en avant, pour le plus grand bonheur des Métal Warriors en qui la propension à supporter les sarcasmes et les rodomontades n'étaient pas très développée.
La nuit était tombée maintenant. Pourtant, un peu plus loin au nord, dans la direction qu'empruntait ce groupe d'humains, il brillait comme une étrange lueur, à la fois fantomatique et nitescente, qui semblait sortir du sol et dont la teinte incarnate ne présageait rien de bien fameux. Les chevaliers devinèrent qu'ils n'étaient plus très loin du
Territoire Pourpre, le territoire de Biff.
Au cours du trajet, ces derniers furent intrigués de constater qu'ils s'étaient mis à suivre un étroit corridor aux flancs escarpés et marmoréens. A ce propos, Guili les informa que leur rivière avait suivi ce chemin même en des temps reculés, ce qui avait eu pour effet de donner naissance en ce sol poreux à un petit canyon. Suite aux aléas du temps, le lit de la rivière s'était vu déplacer et passait dorénavant plus à gauche, au bord de la Forêt Enchantée qui bordait l'inconnu de l'océan.
Toujours est il que ce canyon était l'itinéraire le plus direct pour se rendre dans le territoire de Biff. La propriété de Biff qui d'ailleurs commençait dès après l'extrémité septentrionale du canyon. Et au fur et à mesure que Guili et les siens se rapprochaient de cette extrémité, ils s'étaient faits de plus en plus taiseux comme si l'angoisse avait opéré sur leurs cordes vocales un acte érugineux. Toutefois, seuls et un peu en retrait, Colinéus et la femme aux seins cyclopéens laissaient échapper quelques rires complices. Le Gardien de la Force, qui éprouvait toutes les peines du monde pour seulement apercevoir encore davantage de cette poitrine au ballottement provoquant, ne réussit qu'à attraper un début de torticolis et à amuser la très rouée jeune femme. Cependant, fort de ses innombrables échecs affectifs vécus dans le Vrai Monde, Colinéus savait pertinemment qu'il n'avait plus à attendre très longtemps avant que sa désirée ne cédât à ses avances et pouvoir ainsi soulager ses idées libidineuses.
Quant aux deux autres Métal Warriors, dans l'attente d'actions à venir et vu qu'ils ne trouvaient plus personne avec qui s'entretenir, ils s'occupaient comme ils pouvaient. Horion ne quittait pas du regard Paltemps et sa tête montée sur ressort dont le balancement contredisait toutes les lois physiques qu'ils avaient encore souvenir et qu'il avait médiocrement tenté d'assimiler dans les livres
poussiéreux et abstrus de la bibliothèque de son université. Artefact, pour sa part, très affecté su sentiment d'avoir été honni par les 2 cavaliers, imaginait quelles tortures il infligerait à ceux qui avaient osé porter la main sur son illustre personne. Tel était l'état d'esprit de nos champions quand, entre 2 coudes rapprochés, la petite troupe se trouva face à face avec une arche purpurine et pantagruélique dont les piliers malveillants de par les sigles obscènes qui les sillonnaient pareillement à des rides étaient encastrés dans la pierraille. Du sommet de
l'arche et tels des tentacules de plusieurs centaines de pieuvres aux âmes corrompues, retombaient des lianes desséchées et recouvertes d'épines au bout desquelles suintait un liquide bistre et glutineux comme issu directement du limon originel. Ces lianes, ou quoique ce fût d'autres, étaient agitées de mouvements frénétiques donnant ainsi l'impression de vouloir happer tout ce qui eût pu passer à leurs proximités afin de nourrir invariablement l'entité invisible à qui elles appartenaient, et dont on pouvait ouïr malgré la distance les bruits de succion spumeux de sa bouche affamée.
Heureusement pour le petit groupe, les 2 vengeurs étaient manifestement déjà passés ici car il était clair qu'on avait fraîchement coupé les lianes qui auraient pu entraver leur marche.
- Hum..., voici la porte d'entrée du territoire de Biff, crut bon de préciser Guili d'une voix grumeleuse.
- Hé Horion, t'as vu ce qui est marqué tout en haut ? demanda Artefact pétrifié.
- Oh mon Gnôle ! fit le Mélomane.
- "Vous qui pénétrez ce lieu, abandonnez tout espoir.", lut à haute voix Colinéus.
Cette phrase à l'écriture cunéiforme était encore pire qu'un avertissement. Elle ne laissait entrevoir aucune voie de secours comme si la mort était un fait entendu pour quiconque franchirait cette porte, semblable à la marque indélébile d'un fer chaud sur un quartier de bœuf. Qui plus est, elle provoquait sur tous ceux qui la fixaient d'en bas un sentiment profond d'abattement, de désespoir et leur inoculait perfidement les germes de la peur, du doute et de la perte de toute confiance en soi.
Mais en aucun cas, en dépit de la vague d'effroi et des ondes négatives qu'elle véhiculait, cette phrase n'aurait pu agir telle une impedimenta chez les hommes que Guili avait précautionneusement sélectionné dans son village et encore moins chez les Métal Warriors dont la sapience acquise au fil de leurs aventures leur permettait d'échapper à toute faiblesse mentale de ce genre.
Subséquemment, tout le monde sans exception s'avança droit et infaillible vers l'arche comme l'aurait fait un homme fermement résolu à demander sa fiancée en mariage. Toutefois, en traversant ce monument, personne n'osa porter son attention sur les dessins qui recouvraient principalement l'intérieur des piliers car à la seule sensation de les frôler, cela suffisait à raidir les muscles ainsi qu'à donner une chair de poule glaciale et à faire parcourir le long du corps des picotements comme si celui-ci s'était transformé en autoroutes pour iules et scolopendres.
Une fois l'arche traversée et le coude suivant franchi, le canyon prit brutalement fin... et alors s'offrit devant les yeux écarquillés de ces humains une partie du Territoire Pourpre, un domaine de désolation auprès duquel les massacres engendrés par des guerres nucléaires auraient conféré un juste reflet. Partout gisaient des dépouilles pourrissantes d'hommes et de créatures parfois encore en vie, mais également d'innombrables amoncellements d'os comme si un adepte de scapulomancie avait voulu prédire la vie jusqu'à la fin des temps. Tout était de la couleur du
sang dans un espace d'à peu près 10 hectares.
Les chevaliers et les autres n'avaient pas le choix : ils devaient avancer dans cet espèce d'hypogée à l'air libre qui dégageait des relents indicibles de vie quittant ou ayant quitté des corps dépourvus de matières balsamiques.
La gorge sèche, les yeux tremblotants au bord des larmes et la peur au ventre, ils commencèrent leur périple dans le territoire de Biff qui selon toute vraisemblance était absent... du moins pour l'instant !
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